Origines et fonctionnement des agences de notation
Une agence de rating évalue la solvabilité de créanciers, aussi bien d’entreprises publiques ou privées que d’Etats ou localités. A l’aide d’une échelle de notation, elle communique son appréciation de la probabilité de défaut de paiement.
L’idée d’une agence de notation date de la fin du 19ème siècle, lorsque, dans le cours de la révolution industrielle, de nouveaux créanciers sont arrivés en nombre sur le marché des capitaux, dont la solvabilité était difficilement appréciable par les investisseurs potentiels. Puisque les marchés de capitaux ne croissaient nulle part aussi rapidement qu’aux Etats-Unis, il n’est pas surprenant que les principales agences de notation soient originaires de là-bas. Aussi bien Moody's que Standard & Poor's, les deux agences de notation les plus importantes aujourd'hui, ont été créées dans ce contexte.
Il existe un certain nombre d’agences de rating dans le monde, mais la plupart d’entre elles n’ont qu’une importance nationale ou régionale. Le marché est maîtrisé à hauteur d’environ 95% par trois agences : S&P, Moody’s et Fitch. S&P et Moody’s se partagent environ 80% du marché à parts égales. Fitch, contrôlé par la holding française Fimalac, est nettement plus petit que ses deux principaux rivaux américains.
Censées apporter plus de transparence sur les marchés de capitaux, les agences exercent une fonction utile sur le plan économique. Quelques évaluations discutables, notamment durant la crise financière, et le fait que le marché de la notation financière soit sous la mainmise d’un très petit nombre d’agences, donc dans une situation d’oligopole, les ont cependant récemment mis sous le feu de la critique.
Revenus des agences de notation
Jusqu’à il y environ une quarantaine d’années, les agences de notation se faisaient rémunérer en vendant leurs analyses et notations aux investisseurs qui choisissaient à souscrire à ces publications.
A partir des années 1970, ce modèle a changé, et depuis elles facturent non plus les investisseurs, mais les émetteurs des titres de créances qu’elles évaluent. Les tarifs varient en fonction de la taille et de la complexité de l’émission, et sont de l’ordre de 3 à 10 points de base.
Attribution et évolution d’une note
On distingue deux types de notes, celles de long terme, appliquées aux émissions obligataires, et celles de court terme, qui se réfèrent aux émissions faites sur le marché monétaire (certificats de dépôt, billets de trésorerie, bons du Trésor …).
A noter également qu’un émetteur peut se voir attribuer des notes différentes sur ses émissions, notamment lorsque leurs structures ou statuts juridiques diffèrent. Un titre de créance subordonné aura naturellement une note inférieure à un titre de créance non subordonné, bien que l’émetteur soit le même.
Chaque agence possède sa propre échelle de notation, bien qu’il n’y ait que peu de différence entre les grilles des principales agences. Une fois attribuées, les notes sont ensuite suivies tout au long de la vie des titres, pour être ajustées à la hausse ou à la baisse si la solvabilité de l’émetteur évolue dans un sens ou dans l’autre. Sauf évènement imprévu ou non anticipé, les notes sont mises “sous surveillance” avec une perspective positive ou négative (positive or negative outlook), avant de décider si oui ou non la note sera effectivement changée.
Les grilles des trois principales agences (Moody’s, Standard & Poor’s et Fitch)
Interpretation | ||||||
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Long terme 1 | Court terme | Long terme | Court terme | Long terme | Court terme | |
Aaa ? | P-1 | AAA | A-1+ | AAA | F1+ | Prime Première qualité |
Aa1 ? | AA+ | AA+ | High Grade Haute qualité | |||
Aa2 ? | AA | AA | ||||
Aa3 ? | AA- | AA- | ||||
A1 ? | A+ | A-1 | A+ | F1 | Upper Medium Grade Qualité moyenne supérieure | |
A2 ? | A | A | ||||
A3 ? | P-2 | A- | A-2 | A- | F2 | |
Baa1 ? | BBB+ | BBB+ | Lower Medium Grade Qualité moyenne inférieure | |||
Baa2 ? | P-3 | BBB | A-3 | BBB | F3 | |
Baa3 ? | BBB- | BBB- | ||||
Ba1 ? | Not Prime | BB+ | B | BB+ | B | Non Investment Grade Spéculatif |
Ba2 ? | BB | BB | ||||
Ba3 ? | BB- | BB- | ||||
B1 ? | B+ | B+ | Higly speculative Hautement spéculatif | |||
B2 ? | B | B | ||||
B3 ? | B- | B- | ||||
Caa ? | CCC+ | C | CCC | C | High risk Hautement spéculatif | |
Ca ? | CCC | Extremely speculative Extrêmement spéculatif | ||||
CCC- | Defaulted or close to default Peut-être en défaut | |||||
C ? | D | --- | DDD | --- | Defaulted En défaut | |
--- | DD | |||||
D | 1 Moody’s applique des coefficients numériques de 1 à 3 correspondant à chaque catégorie de notation de Aa à Caa. Le coefficient 1 indique que le titre se situe dans la fourchette haute de l’échelle ; le coefficient 2 correspond à une notation intermédiaire alors que le coefficient 3 correspond à la fourchette basse. |
Utilisation et utilité des notes
Pour les émetteurs, la notation de leur émission est aujourd’hui un passage obligé afin de pouvoir la placer auprès des investisseurs. Nombre d’investisseurs institutionnels notamment ont des contraintes de notes minimum fixés dans leur politique d’investissement. En fournissant une opinion indépendante sur sa solvabilité, une notation permet également à un émetteur peu connu des investisseurs à emprunter plus facilement sur le marché.
Les organismes de régulation financière utilisent également les notations des émetteurs. Un exemple en est notamment la prise en compte de la notation des émetteurs de titres en portefeuille dans le calcul des réserves obligatoires des banques. Le rating d’une émission détermine également si elle peut être présentée comme garantie dans une transaction financière ou non.
Impact économique de l’activité des agences de notation
Malgré les critiques exprimées en direction des agences de notation, la note qu’elles attribuent possède pour un émetteur des conséquences financières non négligeables. Plus la note est élevée, plus son coût de financement sera faible et plus il arrivera facilement à placer ses émissions. Si la note se dégrade franchement, il peut devenir beaucoup plus difficile et coûteux pour lui de se refinancer, ce qui pèsera d’autant plus sur son activité.